Il y a tant de formes de la prière ! De la récitation du chapelet à la méditation silencieuse. « Je l’avise et Il m’avise », disait au Curé d’Ars un de ses paroissiens, en parlant de sa relation priante avec Dieu. À chacune et chacun d’identifier les lieux ou les moments privilégiés de sa prière. Ils sont sûrement et légitimement très divers. Mais, loin de nous disperser, cette variété même nous invite à rejoindre le cœur de la prière et, tout particulièrement ici, à tenter d’identifier le fruit de la prière, quels qu’en soient le lieu et la forme.
La prière met en œuvre trois dimensions essentielles de la foi : l’orientation qui nous « tourne vers Dieu, l’écoute qui se fait obéissance, l’interprétation de la Parole de Dieu, qui nous permet de lire à la lumière de la foi tout ce que nous sommes amenés à vivre.


Nous le pressentons déjà, prier est étroitement lié à l’art de vivre selon l’Évangile. Mieux encore, prier est déjà en soi un fruit de l’Esprit, un lieu où la Parole prend corps. Nous voici tournés vers Dieu, par la prière, dans le désir de l’entendre vraiment. Ce désir est déjà une grâce, un fruit de l’Esprit.  Ainsi, le premier fruit de la prière est dans la prière elle-même lorsqu’elle nous ouvre à la grâce de la connaissance de Dieu, dans la participation au mystère de mort et de résurrection du Christ. Ce que la foi nous donne de croire, voilà que cela fait un avec nous, habite en nous : en nous la Parole s’est faite chair. Et nous pouvons en rendre grâce.
Quand la parole de Dieu, écoutée dans l’obéissance de la foi, trouve son écho dans nos vies, elle y produit son fruit. Ce que la prière nous révèle, il serait très important de le traduire, de le sculpter dans des mots et des gestes neufs, les nôtres, ceux de notre époque. Chacun de nous, ici, est invité à prendre une conscience vive des lieux où, inspiré par la prière, il va mettre en œuvre ce que la prière aura fait mûrir en lui et lui aura fait goûter. Les mots qui nous viennent pour dire le fruit de la prière et qui résonnent dans la vie singulière et concrète, ces mots-là sont à prendre au sérieux. Ils orientent notre attention, notre discernement, notre courage.
Alors nous oserons prolonger la liste des fruits de l’Esprit énumérés par Paul, leur donner le sens qui nous est cher, prier pour qu’ils nous soient accordés et les mettre en pratique : la confiance, la bonté, la beauté dans la souffrance et, par-dessus tout, le pardon.
« Quand vous priez, dites “Notre Père” ». Chaque matin, au réveil, « Notre Père ». Peu importent l’état d’âme ou de corps, le sommeil à peine quitté, l’élan ou le manque de courage. La prière est dite et elle me forge. Elle me sculpte au-dedans. Elle inaugure une journée selon l’intention du Père, qui agira efficacement, je le crois, sans qu’il m’appartienne de savoir comment.
Régine du Charlat, religieuse auxiliatrice